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Épisode 12 : Lettre inattendue

par | 10-08-22 | Roman en cours | 0 commentaires

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Lettre inattendue pour Constance

 

Constance,

Puisque tes brefs passages à la médiathèque nous empêchent désormais d’échanger comme nous avions pris l’habitude de le faire, j’ai décidé de t’écrire.

Oui, je sais, j’aurais pu te téléphoner ou même passer chez toi. Mais t’avoir vu si enthousiaste lors de tes premiers échanges épistolaires m’a donné envie d’essayer à mon tour.

Finalement, je me rends compte que je n’écris plus de courriers personnels depuis bien longtemps. Je le regrette.

Au travail, n’en parlons pas, maintenant tout est informatisé. Je tape sur un clavier presque à longueur de journée.

Heureusement qu’il me reste les contacts avec les partenaires, les abonnés et le reste du personnel.

Tu sais, reprendre le flambeau des mains d’Hubert Mourin, avec sa femme en cadeau surprise, n’est pas chose aisée. Il n’est plus là, mais tous les usages sont restés. Et crois-moi, il est parfois difficile de demander aux gens de changer leurs habitudes.

Chacun avait ses petits rituels avec lui, ses petites combines pour disposer de ses faveurs.

Les anciens ont été formatés pour ne pas dire dressés. De bons petits soldats, toujours plus ou moins à la solde de « Madame la Présidente du CLP, Club de Lecture Paliniérois » (je la vois avec son air pincé et suffisant). Argh !

J’en suis arrivée à la détester. Je ne me reconnais plus. Il faut dire que ses sabotages réguliers ne m’aident pas vraiment. Elle me tape sur les nerfs. Ça tourne à l’obsession. Il n’y a pas que les cadres ou les patrons qui sont des « salauds », des salariés « ascensionnistes » (comme elle) peuvent l’être aussi. Je te l’accorde, ils le sont plus souvent entre eux !

Il faut quand même une sacrée dose d’estime de soi et d’assurance pour arriver ainsi à ses fins.

Prenez machiavélisme, manipulation et égocentrisme, secouez et vous obtiendrez Yvonne. Mieux vaut en rire.

J’ai encore reçu des réflexions de ses copines mercredi après la séance.

Et comme tu es partie vite, je n’ai pas pu te demander ton avis. Elles prétendent que l’atelier pour enfants jouxtant votre salle était encore trop bruyant. Devons-nous revoir selon toi la configuration des locaux, comme elle le demande depuis des mois ? Autant te le dire, ça ne m’enchante guère, mais s’il faut en passer par là, alors pourquoi pas ? Ce sera encore lui donné raison. Ça me tue !

Reconstruire une équipe demande du temps et elle n’est plus très loin de la retraite ! Je me console comme je peux.

J’ai pourtant parfois envie de jeter l’éponge. Partir serait la solution.

Tout recommencer ailleurs, loin de la médiocrité, pourquoi pas ? Qu’en penses-tu ? Et puis dans la minute qui suit, je ne m’en sens pas capable. La peur m’assaille, le risque de tout perdre et de repartir à zéro. As-tu entendu parler de cette vague de démissions aux États-Unis, qui ferait son chemin en France aussi ?

Ma sœur, Annabelle, me sermonne régulièrement : « Il faut que tu sois plus autoritaire, Karine, moins dans la discussion et le consensus ». Elle doit dire vrai, car elle n’est pas du genre à montrer ses faiblesses ou à se laisser marcher sur les pieds ! Annabelle a pris la force de notre mère et moi la sensibilité excessive de notre père. C’est peut-être pour ça que je vis seule, une manière de me préserver.

Je ne sais pas ce qui me prend de me livrer ainsi. Tu n’es pourtant pas un carnet intime. Le pouvoir thérapeutique de l’écriture, certainement. Je me demande si je vais envoyer la lettre. Mais passons avec mes états d’âme…

Je t’ai observé mercredi pendant le club de lecture. Tu étais présente sans l’être. J’ai l’impression que quelque chose te chagrine. Je ne veux pas m’occuper de ce qui ne me regarde pas, mais tu sais que tu peux compter sur moi. C’est un peu bateau dit comme ça, mais c’est sincère.

Un problème avec Becky ou Claude ? Je les connais un peu moins que toi, mais ils m’inspirent plutôt confiance.

Becky est sage comme une image et cherche à s’émanciper de ses parents. Ils la « trainent » ici depuis qu’elle est toute petite, parait-il. Évidemment, ils connaissent très bien Hubert et Yvonne, alors un conseil, fais attention à ce que tu pourrais en dire.

Quant à Claude, il a beaucoup d’humour et est charmant comme un homosexuel peut l’être. Ce n’est pas du tout péjoratif de ma part. Mon meilleur ami pendant mes études l’était aussi.

Il était bien mieux que toutes les punaises et les messieurs muscles, qui m’entouraient à l’époque. Mes meilleures parties de rire, je les lui dois, ainsi que mon regard sur toutes les personnes dites « différentes ». On s’est malheureusement perdu de vue… la vie, les autres rencontres et les renoncements qui vont avec…

Moi aussi, tu vois, il m’arrive de basculer dans la mélancolie, derrière mon sourire paré à toute épreuve.

Maintenant, passons aux choses sérieuses.

Je suppose que tu as remarqué que ton annonce avait disparu du tableau. Avant de l’enlever, j’aurais dû t’en informer. J’en suis désolée, mais l’injonction venait de plus haut. « Ce n’est pas très « conventionnel » comme annonce », m’a-t-on dit.

La hiérarchie m’a donc demandé de la retirer, arguant qu’elle n’y avait pas sa place. J’ai même pris un avertissement pour avoir joué le rôle de l’intermédiaire, ce qui ne fait pas partie des missions de mon poste.

À vrai dire, j’ai très mal vécu cette sanction. Porter atteinte à l’institution en placardant cette annonce sur le tableau officiel, je n’y pensais pas !

Je me suis entendu dire : « Qu’est-ce qui vous a pris, Karine ? Vous avez perdu la tête ? Vous avez idée de l’image désastreuse que vous donnez de la médiathèque ! On n’est quand même pas sur un site de rencontres ! »

Voilà, j’ai fauté et manqué à tous mes devoirs. Résultat, ma tête est mise à prix ! Mon intuition (et pas qu’elle d’ailleurs) me dit que la perfide Yvonne n’est pas innocente à tout ceci.

Bref, je me rends compte que j’arrive à bout de la quatrième page. J’ai comme l’impression que la correspondance est appropriée à la confidence.

J’ai laissé parler mon cœur comme jamais. Est-ce que tu connais cette sensation depuis que tu écris ? Réponds-moi.

Nos discussions me manquent.

Avec toute mon amitié,

Karine

 

 

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